Sarah Biasini comédienne

(Off) Fabio Zenoni : "Ring, une pièce qui impose un rythme!"

Sarah Biasini et Fabio Zenoni viennent d'interpréter une table de multiplications femme fois homme dans Ring de Léonore Confino. Le temps pour eux d'aller aider au rangement du spectacle et de se rafraîchir et nous les retrouvons dans l'arrière-cour du Chêne Noir.

Pouvez-vous nous raconter le pourquoi et le comment de vous retrouver comme ça sur un "Ring" en plein coeur d'Avignon ? Fabio Zenoni : «En fait la pièce a d'abord eu une carrière sur Paris, sans nous deux, avec Audrey Dana et Samy Bouajila. Il était question d'une tournée mais les deux acteurs étaient engagés ailleurs. C'est Sarah qui fut d'abord pressentie pour prendre le relais. Elle a pensé à moi et, après casting, l'affaire était dans le sac.» Sarah : «Oui mais ensuite s'est posée la question d'Avignon car au départ il ne devait s'agir que d'une petite tournée d'une dizaine de jours. Or, s'investir autant en répétitions pour une durée réduite aurait été dommage ! Nous sommes super contents de faire Avignon. Nous espérons que la pièce va plaire et qu'elle va bien se vendre pour étoffer la tournée.»

Un bilan sur ce début de Festival ? Fabio : «Nous montons en tension. En comptant les répétitions, c'est notre quatorzième jour d'affilée et ça devient top! On a un bon rythme. J'ai trouvé la salle géniale aujourd'hui avec de bonnes réactions et un public large de tous les âges.»

Vous êtes des habitués du OFF ? Sarah : «C'est mon cinquième festival et pour Fabio son quatrième. J'étais déjà venue au Chêne. Je m'y plais.» Fabio : « Nous venons aussi en spectateurs, c'était mon cas l'an dernier. L'occasion de croiser plein d'amis qui nous sollicitent pour voir tout plein de spectacles à ne pas rater. Malheureusement pas le temps de pouvoir tout voir mais c'est Avignon, c'est comme ça et c'est comme ça qu'on l'aime ! »

Et cette année vous avez pu assister à des représentations ? Fabio : «Pour l'instant non, j'étais à fond dans les répétitions et dans la concentration. Ring est une pièce qui impose un rythme qui ne souffre pas la demi-mesure. » Sarah : «Comme Fabio, à fond dans le boulot ! J'ai quand même vu le spectacle de Christophe Alévêque, au Chêne lui aussi, et ça m'a beaucoup plu. Mais maintenant que nous sommes bien rôdés je compte bien aller en voir d'autres.»

En parlant de Christophe Alévêque, nous avons en souvenir un spectacle précédent «2000 ans de mensonge» qui présente des similitudes avec Ring. Lui le jouait avec sa compagne à la ville, Serena Reinaldi. Et pour vous, comment parvenez-vous à rendre sur scène une telle proximité sans être en couple dans la vraie vie ? Sarah : «Fabio et moi ça fait dix ans qu'on est amis et c'est vrai que ça aurait été plus délicat avec quelqu'un d'autre. Nous nous connaissons bien, nous nous apprécions beaucoup et ça facilite notre complicité pour nous surpasser dans les rapports spécifiques et variés que nous devons dévoiler à une cadence rapide. C'est la première fois de ma carrière que je dois jouer autant de caractères différents de psychologie féminine dans un temps très compté et je suis contente que ce soit avec Fabio.» Fabio : «Nous cherchons même à nous faire rire l'un l'autre dans les situations cocasses et "olé-olé" que nous sommes amenés à jouer ! Nos rapports ne sont pas que professionnels et c'est très salutaire. Nous ne sommes ni dans la compétition à vouloir tirer la couverture à soi ni dans le reproche de l'autre qui nous tirerait vers le bas.»

Effectivement, vous réussissez la gageure d'être au-dessus du lot des situations de couples incriminées dans le spectacle. Artistiquement et théâtralement parlant votre couple d'acteurs, dans le maelström des couples représentés, fonctionne à merveille. Vous avez une préférence parmi les dix-huit scènes que vous balayez ? Fabio : «J'aime particulièrement celle où la femme a un mari tellement parfait qu'elle se désole de n'avoir rien de truculent à raconter de sa vie de couple à ses amies. Elle a l'impression de ne pas exister. Il lui propose alors de faire croire à ses copines qu'il la tabasse tous les soirs ...et elle de se lamenter encore davantage comme quoi, en plus de tout, il est drôle ! Mais quand il lui suggère d'organiser son faux enlèvement, là, elle entre à fond dans le stratagème...»

Et vous Sarah nous vous trouvons particulièrement fabuleuse lors de la scène en boîte de nuit où, sous l'emprise de l'alcool, vous vous métamorphosez pour passer de la fille exagérément convenable à celle terriblement cash, trash et sexy ! Le tout dans un crescendo de toute beauté où l'on sent, nous aussi public, l'alcool monter dans nos veines... Sarah : «Comme quoi, les verres aidant, l'alchimie de l'amour peut encore faire des miracles. Un gars, une fille que tout oppose vont vraisemblablement se retrouver dans le même lit ! Savoir s'ils vont y rester ou non c'est une autre histoire qui serait l'occasion d'une autre scène.»

Pour finir, vous, qui le vivez actuellement au quotidien dix-huit fois en une heure vingt, la vie de couple vaut-elle la peine d'être interprétée ? (en chœur) « Oui bien sûr ! Nous nous sommes beaucoup investis dans les répétitions mais ça en valait la peine. On tenait vraiment à jouer cette pièce et nous la vivons comme une récompense ! »

Jean-Christophe Gauthier

source :http://www.citylocalnews.com/festival-avignon/2015/07/10/festival-d-avignon

Je vous conseille cette page très interessante du OFF d'Avignon

https://www.facebook.com/avignonleoff?fref=nf

ainsi que celle du Théâtre du Chêne Noir

https://www.facebook.com/profile.php?id=100009360089780&fref=ts

 CRITIQUE DE RING

Construit comme un match de boxe de dix-sept rounds entre un homme et une femme, Ring autopsie le couple dans tous ses états. Tel un scalpel, la plume sans concession de Léonore Confino égratigne nos certitudes et dessine un portrait tendre, incisif et terriblement humain des relations amoureuses. Sur scène, les corps s’attirent, se rejettent, s’enlacent et s’éloignent dans un élégant ballet chorégraphié par Magalie B. La sobre et inventive mise en scène de Catherine Shaub souligne avec réalisme la banalité du quotidien… Affrontez ce spectacle  sans peur et ranimez la flamme.

L’argument : Sarah Biasini et Fabio Zenoni, entre étreintes et uppercuts, pulvérisent, avec une énergie euphorisante, nos certitudes sur le couple. Ring, c’est un terrain de jeu. Pas question de tempérer ses efforts. Parents, amants, étrangers, maris et femmes, Adam et Eve, divorcés, tous se débattent avec leurs instincts, leurs idéaux, leurs réflexes d’enfants. Les clichés sautent, les étiquettes se décollent pour questionner en profondeur le sens ou non-sens de la relation à deux.

Etreinte entre une femme (Sarah Biasini) et une homme (Fabio Zenoni) qui s’aiment © Youri Abenchikar

La critique : Une toile blanche tendue, immaculée, délimite le terrain de jeu où s’échange les baisers, les coups de poing, les « gnons », les coups bas, les murmures et les râles. C’est dans ce Ring – estrade entourée de cordes ou anneau - que deux êtres, un homme et une femme vont se chercher, se déchirer, s’aimer, se comprendre et se détester. Au gré des situations, ils vont écrire leurs histoires en marchant, dansant, courant et virevoltant. C’est un véritable ballet des corps qui esquisse par petite touches, par petites griffes, le quotidien des couples. De paroles en cris, de câlins en violence, d’indifférence en passion, Camille, tantôt homme, tantôt femme, incarnation de la multiplicité du couple, raconte sa vie, ses blessures, ses émotions. Rien de trivial ou de vulgaire, les mots de Léonore Confino sont concis, précis, tranchants comme des couperets, doux comme des agneaux. Son écriture moderne et rythmée passe avec virtuosité du comique au drame, mais jamais ne dévie dans la facilité ou l’outrance. Elle peint le quotidien sans fard, quitte à titiller le spectateur dans ses retranchements, à la limite du malaise,  le forçant à prendre conscience de la dérive de sa propre histoire. On peut toutefois regretter que dans son propos, la femme soit souvent la fautive. Erreur de jeunesse à n’en pas douter.

Parents, amants, étrangers, séparés, mariés, couple biblique originel, rencontres d’un soir et plans « drague » à la limite du coma éthylique, composent cet incroyable patchwork de saynètes qui se suivent et s’enchevêtrent avec fluidité. La mise en scène de Catherine Shaub souligne le propos et le sublime. En limitant le décor à un banc et un lit qui apparaissent et disparaissent au gré des circonstances, elle utilise cette page blanche qui sert de toile de fond pour incruster des projections vidéo ponctuant chaque histoire, modulant à loisir l’espace et l’environnement de ces couples à la dérive. Cet esthétisme épuré s’accorde parfaitement avec le sens profond de la pièce et avec les réflexions de l’auteure sur le couple.

Dans ce Ring, nos deux comédiens s’accordent à la perfection. Leurs corps s’unissent en symbiose dans une chorégraphie du baiser parfaitement orchestrée par Mélanie B. Fabio Zenoni se fond avec une étonnante et incroyable facilité dans tous les personnages qu’il incarne, de l’ex-compagnon jaloux au « beauf », en passant par l’amoureux transi et le père de famille épuisé. Il nous emporte sur toutes les cordes du sensible sans jamais nous laisser en chemin. Sarah Biasini garde quelque chose de l’enfance. Plus à l’aise dans le rôle de la femme enfant, elle surprend toutefois dans les nuances plus dures et plus dominatrices des protagonistes qu’elle interprète.

Ring, match de boxe sentimental © Youri Abenchikar

De cette bataille entre les deux sexes, de cette harmonie des sentiments, de cette vision hyper-réaliste des tribulations de couples, le public, légèrement « sonné », est renvoyé à sa propre histoire… Un uppercut salutaire à prendre tel quel, sans modération.

source : http://www.loeildolivier.fr/

Photographe : Luc Roux

Et c'est parti au théâtre du Chêne Noir jusqu'au 26 juillet (relâche les 10, 17 et 24 juillet). Rendez-vous à 16 h 45 mn !!

Retrouvez une "brève" interview de Sarah et Fabio ici :

http://www.ledauphine.com/vaucluse/2015/07/04/sarah-biasini-et-fabio-zenoni-evoquent-la-piece-ring